Le diabète et vos yeux

Le diabète est une pathologie fréquente et qui le sera de plus en plus dans les années à venir du fait de nos modes de vies et de l’augmentation de l’espérance de vie. L’organisation mondiale de la santé prévoit d’ici à 2050 plusieurs centaines de millions de patients diabétiques dans le monde. Notre pays est directement concerné avec une augmentation de la prévalence (nombre total de malades en France) de la maladie chaque année.
Schématiquement en simplifiant, on distingue deux types de diabète, le type 1 qui est lié à défaut de sécrétion d’insuline par le pancréas et le diabète de type 2 qui est lié à une mauvaise réponse du corps à l’insuline secrétée.

Le diabète induit une altération des vaisseaux de gros calibres (par exemple les coronaires) mais aussi de petits calibres (par exemple  les capillaires des yeux ou des reins). Les deux principaux facteurs de risque d’avoir une dégradation des vaisseaux au cours du diabète sont :
-un mauvais équilibre du diabète
-une longue durée d’évolution

Les grandes complications oculaires sont :
-la rétinopathie diabétique
-la maculopathie diabétique
-la cataracte précoce
-le glaucome

Cataracte sous capsulaire
Cataracte sous capsulaire chez un patient diabétique

Dans tous les cas, même si des traitements spécifiques existent, le suivi d’un patient diabétique insiste sur un bon équilibre glycémique et un contrôle des facteurs de risques cardiovasculaires (contrôle de la tension, traitement de l’hypercholestérolémie, arrêt du tabac, activité physique). Un diabète très déséquilibré est à haut risque de complications graves qui sont détaillées ci-dessous. Un dépistage annuel par examen du fond d’œil est recommandé.

Photographie du fond d'œil en grand champ

La rétinopathie diabétique

Au niveau des yeux, l’atteinte diabétique est liée principalement à l’ischémie rétinienne (diminution de la perfusion sanguine de la rétine). En effet le déséquilibre glycémique chronique provoque une occlusion des capillaires. De manière normale ils sont le lieu d’échange entre oxygène et dioxyde de carbone permettant l’oxygénation optimale des cellules de la rétine neurosensorielle. En cas d’occlusion de ces capillaires les échanges ne se font plus, et l’hypoxie chronique provoque une souffrance des cellules rétiniennes . Les cellules souffrantes vont alors secréter du VEGF (vascular endothlial growth factor) qui est un facteur pro-angiogénique favorisant l’apparition de nouveaux vaisseaux (nommés néovaisseaux) rétiniens. Or ces néovaisseaux sont nocifs car ils se développent rapidement et de manière anarchique.
À terme ces néovaisseaux provoquent de multiples complications :
-décollement tractionnel de la rétine
-hémorragies intra vitréennes (hémorragies remplissant la cavité vitréenne)
-glaucome néovasculaire (apparition de néovaisseaux dans l’angle iridocornéen, ce qui provoque sa fermeture et un glaucome d’une extrême gravité)
Dans ces complications graves, des pertes sévères voire totales d’acuité visuelle sont fréquentes. De plus l’évolution est insidieuse ce qui rend la maladie dangereuse, il n’existe aucun symptôme précurseur et la pathologie est totalement asymptomatique au début. Lorsque la pathologie devient symptomatique le patient se plaint d’une baisse d’acuité visuelle souvent irréversible, dans les pires cas il peut survenir une perte anatomique des globes oculaires.

La rétinopathie diabétique ne se limite pas à une localisation en particulier et concerne toute la rétine périphérique. Son installation est lente et peut prendre plusieurs années. Dans certains cas particuliers elle évolue rapidement (puberté, grossesse, etc…).
Le dépistage de la rétinopathie diabétique est recommandé chez tous les patients diabétiques une fois par an, à vie. La réalisation du « fond d’œil » annuel permet de surveiller la rétine périphérique et, en cas d’apparition de premiers signes d’atteintes vasculaires, de proposer un traitement préventif par laser argon afin d’éviter l’évolution vers les complications. En effet le laser argon permet de détruire les cellules rétiniennes souffrantes et d’éviter ainsi la sécrétion du VEGF et d’arrêter l’évolution de la maladie.

La maculopathie diabétique ou œdème maculaire diabétique

La macula est la zone centrale de la rétine qui permet la lecture et la vision fine, c’est une structure très particulière dont l’anatomie est différente de la rétine périphérique. La maculopathie est une nouvelle fois liée à la capillaropathie (maladie des capillaires) diabétique mais dans ce cas c’est un mécanisme mixte d’ischémie (comme pour la rétinopathie périphérique) et de fuite vasculaire : une atteinte des « joints » entre les capillaires provoque la fuite de liquide hors des vaisseaux et une perturbation du fonctionnement des cellules de la macula. La maladie est dépistée par un examen du fond d’œil et une tomographie à cohérence optique (OCT) qui est plus sensible pour dépister la présence d’un œdème maculaire diabétique.
Contrairement à la rétinopathie, le patient ressent une baisse d’acuité visuelle notamment de la vision de près (lecture par exemple).
Dans ce cas le traitement n’est pas un laser argon mais un traitement par injection intra vitréenne (injection dans l’œil) de produits permettant un « assèchement » de la rétine et une remontée de l’acuité visuelle. On peut traiter la maculopathie diabétique par des injections de médicaments, soit des corticoïdes, soit des anticorps anti VEGF. Dans les deux cas l’objectif est de restaurer une étanchéité des capillaires en arrêtant la fuite du liquide en secteur extravasculaire.

Sur cette image en OCT on retrouve la présence de liquide sous rétinien signalant la présence d'une récidive nécessitant de nouvelles injections intra-vitréennes.

La cataracte et le glaucome

La cataracte est liée à un dépôt de protéines au sein du cristallin, qui avec le temps s’opacifie et provoque une baisse d’acuité visuelle. L’hyperglycémie provoque une accélération de ces mécanismes, ce qui favorise l’apparition plus rapide d’une cataracte chez les patients diabétiques. Le traitement chirurgical est le même que pour une cataracte classique.

Le diabète est un facteur de risque de glaucome, la pathologie est traitée dans cette partie.

Chirurgie de cataracte par phakoémulsfication et injection d'un implant intraoculaire.